RIGOLETTO
Il est difforme, bossu, raillé de tous, condamné au rôle de bouffon. Il s'y emploie avec une rage douloureuse, une joie mauvaise, flattant et favorisant les vices de son libertin de maître, riant à son tour de l'infortune de ceux qui en sont les victimes. Il a pour nom Rigoletto. Elle est belle, douce aimante et pure. Elle est sa fille, sa consolation, sa raison de vivre, son unique source de joie et de tendresse. Elle se nomme Gilda. Il est beau, puissant. Il règne sur Mantoue. Il est le Duc, séducteur invétéré et sans scrupule, jouissant de la vie mais sans respect de celle des autres, désirant, s'éprenant intensément des femmes mais incapable d'aimer vraiment. Le destin va les lier inexorablement. L'enjeu en sera la lumineuse Gilda. Elle est l'incarnation de l'Amour, celui qui unit la chair et l'esprit, qui a pouvoir de guérir, de rédimer, de transfigurer les êtres. Elle offre à l'un le pardon, à l'autre cette grâce salvatrice qu'il a entrevue un instant auprès d'elle. Ni l'un, ni l'autre ne sauront s'en saisir. Et l'inévitable s'accomplira. Mais la musique de Verdi atteint un tel degré d'intensité, d'émotion, de beauté, qu'elle nous arrache à la pesanteur tragique, pour nous emporter, non pas comme la fameuse plume au vent que chante le duc, mais à travers la mise en scène de Pierre Thirion-Vallet, tels des aventuriers de l'âme et du cœur chevauchant l'aile puissante de l'amour.
Pierre Thirion-Vallet, metteur en scène